BRUXELLES, le 5 décembre 2025 – Un an après la publication par Le Soir d'un rapport accablant, la question de l'égalité femmes-hommes au sein de la diplomatie belge refait surface avec une acuité renouvelée. En décembre 2025, le constat est sans appel : malgré les appels au changement et quelques initiatives éparses, la Belgique continue de traîner les pieds, affichant une proportion d'ambassadrices qui la place systématiquement parmi les derniers élèves de la classe européenne. Le chiffre choc de 18 % d'ambassadrices en poste en 2024, loin de s'être significativement amélioré, demeure un symbole persistant de la lenteur du progrès dans ce domaine crucial.

La Belgique, un Cancre Persistant de la Diplomatie Paritaire

L'année dernière, en 2024, les données révélées par la presse nationale avaient jeté une lumière crue sur une réalité peu reluisante : seulement 18 % des missions diplomatiques belges à l'étranger étaient dirigées par des femmes. Ce chiffre, qui plaçait alors la Belgique au même niveau que des pays comme la Grèce ou la Hongrie et très loin derrière des leaders tels que la Suède (plus de 50 %) ou la France (près de 40 %), avait provoqué une vague d'indignation et de débats au sein des cercles politiques et diplomatiques. Un an plus tard, en cette fin d'année 2025, bien que des chiffres consolidés pour l'exercice en cours ne soient pas encore disponibles publiquement, les observations internes et les nominations récentes ne suggèrent pas d'amélioration spectaculaire qui permettrait au Royaume de sortir de cette position peu enviable. Nos infographies interactives, basées sur les données les plus récentes disponibles et les tendances de ces dernières années, illustrent avec précision l'ampleur du fossé qui sépare la Belgique de ses partenaires européens.

Pourquoi une Telle Lenteur ? Les Rouages d'une Inégalité Persistante

La question n'est pas nouvelle, mais sa persistance interroge. Pourquoi le corps diplomatique belge peine-t-il autant à se féminiser à ses plus hauts échelons ? Les explications sont multifactorielles et souvent profondément ancrées dans des structures et des mentalités. Historiquement, la diplomatie a longtemps été un bastion masculin, un modèle perpétué par des réseaux et des mécanismes de promotion qui, consciemment ou non, ont favorisé les hommes.

• Les filières de recrutement : Bien que les concours d'entrée au SPF Affaires étrangères soient ouverts et attirent un nombre croissant de candidates féminines, l'entonnoir semble se resserrer à mesure que l'on gravit les échelons hiérarchiques.
• La gestion de carrière et les affectations : Les affectations à l'étranger, souvent exigeantes et synonymes de déracinement familial, sont parfois perçues comme plus difficiles à concilier avec les responsabilités familiales, qui pèsent encore majoritairement sur les femmes. Bien que les politiques de soutien aux familles diplomatiques existent, leur application et leur efficacité peuvent varier.
• Le "plafond de verre" et les stéréotypes : Des biais inconscients peuvent encore influencer les processus de nomination aux postes d'ambassadeur, où l'expérience, le réseau et une certaine "allure" sont traditionnellement associés à des modèles masculins. La perception du leadership diplomatique féminin, bien que de plus en plus reconnue pour ses atouts (négociation, empathie, résilience), doit encore s'imposer pleinement.
• Manque d'ambition politique ? Certains observateurs critiquent un manque de volonté politique forte et de cibles quantitatives claires pour accélérer le processus, au-delà des déclarations d'intention.

L'Impact sur l'Image et l'Efficacité de la Diplomatie Belge

Au-delà du principe d'égalité, cette sous-représentation a des conséquences tangibles. Une diplomatie non paritaire renvoie une image obsolète de la Belgique sur la scène internationale, pays pourtant réputé pour son engagement en faveur des droits humains et de l'égalité. En outre, elle se prive d'une diversité de perspectives et d'approches qui sont pourtant essentielles dans la complexité des défis mondiaux actuels, qu'il s'agisse de sécurité, de développement ou de crises climatiques. Les ambassadrices apportent des compétences et des sensibilités uniques, enrichissant les échanges et renforçant l'efficacité des négociations.

Comme le souligne un rapport récent du Centre d'Études Européennes, "une diplomatie qui reflète mieux la diversité de sa population est une diplomatie plus légitime, plus crédible et, in fine, plus performante. La Belgique, en restant à la traîne, met en péril son influence et sa pertinence à l'échelle européenne et mondiale."

Les Efforts en Cours : Insuffisants pour Inverser la Tendance ?

Face à ces critiques, le Service Public Fédéral Affaires étrangères a, depuis les révélations de 2024, mis en avant diverses mesures. Le Ministre des Affaires étrangères a réaffirmé son engagement à renforcer la parité, évoquant des plans de formation et de mentorat spécifiques pour les femmes cadres, ainsi qu'une sensibilisation accrue aux biais de genre au sein des commissions de nomination. Des objectifs de mixité ont été évoqués pour les prochaines vagues de nominations, avec l'espoir de voir la proportion d'ambassadrices atteindre 30 % d'ici 2028.

Cependant, pour de nombreux acteurs de la société civile et des associations de femmes diplomates, ces mesures restent insuffisantes et manquent de l'ambition nécessaire pour opérer un véritable changement structurel. "Il ne suffit pas de cocher des cases. Il faut une réelle transformation culturelle et des objectifs contraignants, avec des mécanismes de suivi clairs, pour que la Belgique ne soit plus la risée de ses partenaires européens en matière de parité diplomatique", déclare une représentante d'une plateforme féministe interrogée par EuroMK News.

L'Exemple Européen : Des Modèles à Suivre

L'examen des pratiques de nos voisins européens, notamment à travers nos infographies interactives dédiées, révèle des trajectoires bien différentes. Des pays comme la Suède, la Finlande ou le Canada (hors UE mais souvent cité en exemple) ont démontré qu'une volonté politique forte, associée à des programmes de soutien structurés et des quotas implicites ou explicites, peut transformer radicalement la donne. Non seulement ces pays affichent des taux de représentation féminine bien supérieurs, mais leur diplomatie est également perçue comme plus moderne, inclusive et représentative des valeurs contemporaines.

Ces succès ne sont pas le fruit du hasard mais d'une politique délibérée visant à déconstruire les stéréotypes, à identifier et accompagner les talents féminins, et à instaurer une culture d'entreprise qui valorise la diversité. La Belgique a tout à apprendre de ces expériences pour espérer rattraper son retard.

Conclusion : Urgence d'une Révolution Culturelle

En cette fin d'année 2025, alors que le monde diplomatique se prépare à de nouveaux défis, la Belgique ne peut plus se permettre de maintenir une diplomatie qui ne représente qu'imparfaitement sa population. L'égalité femmes-hommes n'est pas qu'une question de justice sociale ; c'est un impératif stratégique pour une nation qui se veut influente et respectée sur la scène internationale. Les chiffres de 2024 ont servi de sonnette d'alarme ; l'absence de progrès significatifs un an plus tard doit être un catalyseur pour une action plus audacieuse et résolue. Le temps des promesses vagues doit laisser place à celui des actions concrètes et des résultats mesurables, pour qu'enfin, les femmes diplomates belges puissent pleinement prendre leur place légitime aux tables où se dessine l'avenir du monde.