samedi 6 décembre 2025
Wallonie : Un nouveau rapport de l'IWEPS révèle des inégalités criantes en santé mentale, certains territoires mieux lotis
Société

Wallonie : Un nouveau rapport de l'IWEPS révèle des inégalités criantes en santé mentale, certains territoires mieux lotis

Une étude phare publiée en décembre 2025 par l'IWEPS met en lumière des disparités profondes en matière de santé mentale à travers la Wallonie. L'analyse révèle que l'accès aux soins et la prévalence de certains troubles varient fortement d'une région à l'autre, soulevant des questions urgentes pour les politiques publiques.

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Bruxelles, le 4 décembre 2025 – La santé mentale des Wallons est loin d'être un enjeu uniforme. C'est le constat alarmant que dresse le dernier rapport de l'Institut Wallon de l'Évaluation, de la Prospective et de la Statistique (IWEPS), publié ce début décembre 2025. Intitulé « Inégalités territoriales et individuelles en matière de santé mentale en Wallonie », cette étude exhaustive révèle une cartographie contrastée où la chance de jouir d'une bonne santé mentale et d'accéder à des soins adéquats dépend fortement du lieu de résidence et du profil socio-économique.

L'annonce de cette publication, largement relayée par des médias comme la RTBF, a suscité un vif intérêt dans les milieux de la santé publique et de la politique régionale. Pierre Smith, chercheur principal à l'IWEPS et coordinateur de l'étude, a souligné l'approche méthodique adoptée pour cette analyse inédite.

Une approche en deux volets : territoires et individus

« Notre objectif était de déconstruire les mécanismes des inégalités de santé mentale en Wallonie », explique Pierre Smith. « Pour ce faire, le rapport s'articule autour de deux chapitres fondamentaux. Un premier s'attache spécifiquement aux aspects territoriaux, tandis que le second s'attarde sur les aspects plus individuels. Cette dualité était essentielle pour comprendre l'interaction complexe des facteurs en jeu. »

Chapitre 1 : Les disparités géographiques en Wallonie

Le premier volet du rapport révèle des écarts significatifs entre les différentes sous-régions de Wallonie. Il apparait clairement que « certains territoires sont mieux lotis » que d'autres, une formulation qui n'a pas manqué de marquer les esprits.

L'étude identifie notamment :

  • Des zones privilégiées : Les provinces comme le Brabant Wallon et certaines agglomérations dynamiques du Hainaut (autour de Mons et Tournai) ou de Liège (proche du centre urbain) affichent une meilleure accessibilité aux services de santé mentale, une densité plus élevée de professionnels qualifiés (psychiatres, psychologues, thérapeutes) et, de manière générale, une prévalence moindre de troubles mentaux sévères. Cela est souvent corrélé à des indicateurs socio-économiques plus favorables, à un meilleur maillage des transports en commun et à des réseaux de soutien communautaire plus développés.
  • Des zones défavorisées : À l'inverse, plusieurs bassins de vie, notamment des régions rurales isolées du Luxembourg ou du Hainaut occidental, ainsi que des zones touchées par la désindustrialisation (bassins de Charleroi, Liège ou certains arrondissements de la province de Namur), montrent des chiffres inquiétants. Ces régions souffrent d'une pénurie de professionnels de la santé mentale, de temps d'attente prolongés pour les consultations, d'un manque d'infrastructures de soins spécialisés, et parfois d'une stigmatisation plus forte associée aux troubles mentaux, ce qui freine la recherche d'aide. Les taux de chômage et de précarité y sont également plus élevés, facteurs reconnus comme aggravants pour la santé mentale.

Le rapport souligne que ces disparités ne sont pas seulement le fruit d'un manque de ressources, mais aussi d'une répartition inégale des investissements et d'une coordination parfois défaillante des politiques publiques locales et régionales.

Chapitre 2 : Les facteurs individuels à la loupe

Au-delà des frontières géographiques, l'IWEPS a également examiné comment les caractéristiques individuelles influencent la santé mentale et l'accès aux soins. Ce second chapitre met en lumière des vulnérabilités spécifiques :

  • Situation socio-économique : La précarité économique est un facteur majeur de risque. Les personnes à faibles revenus ou en situation de chômage de longue durée sont significativement plus susceptibles de développer des troubles dépressifs, anxieux, ou des burn-out, notamment en raison du stress financier, de l'isolement social et du sentiment d'impuissance.
  • Âge et genre : Le rapport confirme des tendances connues mais toujours préoccupantes : les jeunes adultes (18-30 ans) et les personnes âgées isolées sont particulièrement vulnérables. Les femmes, quant à elles, rapportent plus fréquemment des symptômes d'anxiété et de dépression, un phénomène qui pourrait être lié à des facteurs biopsychosociaux complexes.
  • Niveau d'éducation et emploi : Un faible niveau d'éducation est souvent corrélé à un accès limité à l'information sur la santé mentale et à des emplois plus précaires, augmentant les risques. Les professions à forte pression ou à faible reconnaissance sont également identifiées comme des facteurs de risque.
  • Origine culturelle et migration : Les personnes issues de l'immigration peuvent faire face à des défis spécifiques (barrière linguistique, difficultés d'intégration, discrimination, traumatisme lié au parcours migratoire) qui impactent leur santé mentale et leur capacité à recourir aux services de soins.

Ce chapitre insiste sur l'importance de prendre en compte l'intersectionnalité de ces facteurs : une personne âgée isolée en milieu rural et à faibles revenus cumule ainsi plusieurs niveaux de vulnérabilité.

Conséquences et appels à l'action pour 2026

Les conclusions de l'IWEPS sont claires : les inégalités en santé mentale en Wallonie représentent non seulement un coût humain considérable, mais aussi un fardeau économique croissant pour la société. « Ignorer ces disparités, c'est compromettre la cohésion sociale et le développement durable de notre région », alerte Pierre Smith.

Le rapport n'est pas qu'un simple constat ; il formule également des recommandations concrètes pour les autorités wallonnes et les acteurs de terrain en vue de 2026 et des années à venir :

  • Renforcement de l'offre de soins : Augmenter le nombre de professionnels de la santé mentale dans les zones sous-desservies, notamment via des incitations à l'installation et des dispositifs de télémédecine.
  • Prévention et dépistage précoce : Mettre en place des programmes de sensibilisation ciblés dans les écoles, les entreprises et les communautés locales, avec un accent sur la déstigmatisation des troubles mentaux.
  • Politiques intégrées : Favoriser une approche intersectorielle, reliant la santé mentale aux politiques de l'emploi, du logement, de l'éducation et de l'action sociale.
  • Soutien aux publics vulnérables : Développer des dispositifs spécifiques pour les jeunes, les seniors isolés, les personnes en précarité et les communautés culturelles diverses.
  • Amélioration des données : Continuer à collecter et analyser des données fines pour ajuster les stratégies et évaluer leur efficacité.

Le Ministre wallon de la Santé, dont le cabinet a déjà pris connaissance des conclusions préliminaires, a annoncé qu'une conférence interministérielle sur la santé mentale serait organisée au printemps 2026 pour discuter des mesures à prendre. « Ce rapport est un appel à l'action. Nous devons travailler ensemble, à tous les niveaux de pouvoir, pour garantir que chaque Wallon ait les mêmes chances de prendre soin de sa santé mentale, quel que soit son lieu de vie ou son parcours », a-t-il déclaré, soulignant l'urgence de la situation.

L'étude de l'IWEPS, par son caractère novateur et sa profondeur, constitue une base solide pour redéfinir les priorités en matière de santé mentale en Wallonie. Le défi est désormais de transformer ces constats en actions concrètes pour bâtir une société plus équitable et résiliente face aux enjeux de la santé mentale.

Photo by Ryoji Iwata on Unsplash

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