Woking, Royaume-Uni – Le calendrier de la Formule 1 2025 vient tout juste de se clore, et tandis que le rideau est tombé sur une saison riche en émotions, une interrogation lancinante persiste autour de McLaren : cette écurie emblématique a-t-elle véritablement les épaules d'une prétendante au championnat du monde ? La question, que nous posions déjà la semaine dernière, est plus pertinente que jamais à la suite des événements du Grand Prix du Qatar, la pénultième manche de la saison 2025, où une certaine fragilité stratégique a été, une fois de plus, cruellement exposée.

Le Grand Prix du Qatar 2025 : Un Miroir des Faiblesses

Le Circuit International de Lusail, théâtre du Grand Prix du Qatar fin novembre 2025, était supposé être une étape clé pour McLaren. Après une série de performances prometteuses en milieu de saison, l'équipe de Woking arrivait avec l'ambition de consolider sa troisième place au championnat constructeurs et de mettre la pression sur ses rivaux pour les places d'honneur. La monoplace, propulsée par Mercedes, a montré une vélocité impressionnante tout au long du week-end, tant en qualifications qu'en rythme de course.

Cependant, ce qui aurait dû être un triomphe potentiel s'est transformé en un exercice de frustration. La pierre angulaire de la débâcle a été une série de décisions stratégiques pour le moins discutables. Dès les premiers tours, une opportunité de 'undercut' pour Lando Norris a été manquée, alors que plusieurs concurrents ont plongé dans les stands pour changer de pneus avec succès. L'équipe a hésité, perdant de précieuses secondes et des positions. Plus tard dans la course, sous régime de voiture de sécurité virtuelle (VSC) – suite à l'immobilisation de la voiture de Guanyu Zhou – la fenêtre pour un arrêt gratuit s'est ouverte. Alors que la plupart des équipes de tête ont réagi promptement, McLaren a temporisé, espérant peut-être une voiture de sécurité réelle qui n'est jamais venue. Le résultat ? Les deux pilotes, Lando Norris et Oscar Piastri, ont été contraints de faire un arrêt plus tard, dans des conditions de course normales, perdant encore plus de temps et reléguant Norris hors du top 5, et Piastri hors des points.

« C'est incroyablement frustrant quand vous savez que la voiture a le potentiel, et que les performances ne sont pas concrétisées à cause de décisions qui ne semblent pas alignées avec le déroulement de la course », a confié Lando Norris, l'air visiblement abattu, après la course au micro de la presse.

Un Schéma Récurrent qui Coûte Cher

L'incident du Qatar n'est malheureusement pas un cas isolé pour McLaren en 2025. Tout au long de la saison, des exemples similaires ont émaillé le parcours de l'équipe. On se souvient des hésitations lors du Grand Prix de Monaco, où une stratégie de pneus trop conservatrice a coûté un podium à Piastri. Ou encore du Grand Prix de Belgique, où une décision tardive de changement de pneus sous la pluie a vu Norris chuter de la troisième à la septième place.

Ces erreurs se manifestent sous diverses formes :

• Mauvais timing des arrêts aux stands : Une tendance à réagir plutôt qu'à anticiper les mouvements des rivaux.
• Choix de pneus suboptimaux : Parfois trop prudents, parfois trop agressifs, mais rarement parfaitement adaptés aux conditions changeantes ou au plan de course.
• Manque de flexibilité sous pression : Une difficulté à adapter rapidement la stratégie lorsque des événements imprévus (Safety Car, VSC, pluie) surviennent.
• Communication interne : Des doutes planent sur la clarté et la rapidité des échanges entre le muret des stands, les ingénieurs et les pilotes.

Ce paradoxe est d'autant plus troublant que McLaren a fait des progrès considérables sur le plan technique et aéro-dynamique. Depuis la fin de la saison 2023 et tout au long de 2024, l'équipe a su développer une monoplace capable de rivaliser avec les meilleures sur de nombreux circuits. La vitesse brute est là, le talent des pilotes est indéniable, mais c'est l'exécution stratégique qui fait défaut.

Les Conséquences sur le Championnat et la Morale de l'Équipe

Ces erreurs stratégiques ont des répercussions directes sur le classement. En 2025, McLaren aurait pu viser plus haut au championnat constructeurs. Chaque point perdu à cause d'une mauvaise décision est un coup porté aux ambitions de l'équipe et, in fine, à ses revenus et à sa position dans la hiérarchie de la F1. Le manque de régularité dans les résultats, malgré la performance de la voiture, nourrit également un sentiment de frustration chez les pilotes et au sein du personnel.

Andrea Stella, le Team Principal, a reconnu à plusieurs reprises la nécessité d'améliorer ce secteur. « Nous sommes conscients que la stratégie est un domaine où nous devons progresser. Nous analysons constamment nos processus », a-t-il déclaré plus tôt dans l'année. Pourtant, les résultats sur la piste tardent à suivre ces déclarations d'intention.

La culture de l'équipe, jadis synonyme de perfectionnisme et d'innovation sous l'ère de Ron Dennis, semble aujourd'hui peiner à retrouver cette rigueur. L'investissement massif de la part de l'actionnaire majoritaire, Bahrain Mumtalakat Holding Company, est là pour ramener l'équipe au sommet. Mais l'argent seul ne peut compenser les failles opérationnelles.

L'Urgence de Réformes pour 2026 et Au-delà

Alors que la Formule 1 se prépare à une refonte majeure de son règlement technique pour 2026, l'enjeu pour McLaren est colossal. La nouvelle ère offre une opportunité de réinitialiser les compteurs et de se positionner comme un challenger sérieux pour le titre. Mais cela ne sera possible que si les problèmes stratégiques sont résolus en profondeur.

Des rumeurs circulent déjà concernant d'éventuels changements au sein de l'équipe stratégique, voire des recrutements externes pour apporter une expertise nouvelle et une perspective différente. L'intégration de l'intelligence artificielle et de l'analyse de données avancée dans la prise de décision en temps réel est une voie explorée par de nombreuses écuries. McLaren doit impérativement s'assurer qu'elle utilise les outils les plus performants et qu'elle a le personnel le plus qualifié pour les interpréter sous la pression de la course.

En conclusion, le Grand Prix du Qatar 2025 n'a fait que renforcer une triste vérité pour McLaren : malgré une monoplace compétitive et des pilotes de talent, les erreurs stratégiques continuent de peser lourdement sur ses ambitions. Pour retrouver sa grandeur passée et se hisser au rang d'écurie championne du monde, McLaren doit impérativement corriger ces failles. Sans cette transformation fondamentale, le potentiel restera un mot vain, et l'équipe de Woking continuera à regarder les trophées lui échapper, non par manque de vitesse, mais par manque de clairvoyance au moment crucial.