Décembre 2025. Le marché belge de la grande distribution est en proie à une effervescence mêlée d'incertitude, et c'est l'un de ses acteurs majeurs, Carrefour Belgique, qui se retrouve au centre des interrogations. Selon des informations initialement révélées par Le Soir et confirmées par nos sources, le groupe Carrefour procède actuellement à une analyse approfondie de l'ensemble de ses actifs mondiaux. Bien qu'aucune décision officielle n'ait été prise concernant spécifiquement la Belgique à cette date, cette séquence illustre les pressions considérables et les nombreux enjeux qui pèsent sur cette filiale.

La question qui brûle toutes les lèvres – Carrefour est-il sur le point de quitter la Belgique ? – n'a pas encore de réponse formelle. Cependant, le simple fait que cette hypothèse soit activement examinée par la direction du groupe est un signal fort, réactivant les craintes d'un potentiel désengagement ou, à tout le moins, d'une restructuration d'ampleur. Pour les milliers d'employés, les nombreux franchisés et l'ensemble du tissu économique belge, l'attente d'une clarification est palpable.

Un Historique Belge Marquée par les Défis et les Restructurations

L'histoire de Carrefour en Belgique est une longue saga faite d'acquisitions ambitieuses, de tentatives de redressement et de restructurations successives. C'est en 2007 que le géant français avait consolidé sa présence en rachetant les supermarchés GB à GIB, espérant capitaliser sur un marché prometteur. Cependant, les attentes n'ont pas toujours été au rendez-vous.

Dès le début des années 2010, face à des résultats décevants, Carrefour Belgique a dû engager plusieurs plans de transformation. Le plus notable fut le plan « Carrefour 2022 », qui, à partir de la fin des années 2010, visait à adapter le modèle économique en cédant la plupart des hypermarchés et supermarchés en propre à des franchisés indépendants. Cette stratégie, censée réduire les coûts opérationnels et transférer les risques, a vu une grande partie du parc de magasins passer sous gestion locale. Si elle a allégé le bilan direct du groupe, elle n'a pas pour autant résolu tous les problèmes structurels liés à un marché particulièrement ardu. En 2025, Carrefour Belgique opère ainsi majoritairement via des partenariats franchisés, mais la centrale reste garante de la marque, de la logistique et de l'approvisionnement.

Les Piliers de l'Incertitude en Décembre 2025

Une Concurrence Féroce et un Marché Saturé

La Belgique est un véritable champ de bataille pour la grande distribution. Des géants locaux comme Colruyt et Ahold Delhaize (Delhaize, Albert Heijn) dominent le paysage, connus pour leur efficacité logistique, leur gestion des prix ou leur forte implantation historique. À cela s'ajoutent des discounters allemands ultra-agressifs tels qu'Aldi et Lidl, qui ont continué de gagner des parts de marché ces dernières années grâce à des prix imbattables et une perception de qualité en hausse. La particularité géographique du plat pays, densément peuplé, accentue cette compétition féroce où chaque mètre carré et chaque part de portefeuille client est âprement disputé.

La Pression sur les Prix et les Marges

Après la vague inflationniste qui a marqué 2022 et 2023, les consommateurs belges sont plus que jamais sensibles aux prix. Cette vigilance accrue a poussé de nombreux ménages à se tourner vers les marques de distributeurs ou les discounters. Pour Carrefour, maintenir des prix compétitifs tout en absorbant des coûts opérationnels significatifs – notamment les salaires – représente un défi constant. La rentabilité de la filiale belge est ainsi sous étroite surveillance, et les attentes du siège en matière de retour sur investissement sont élevées dans un contexte économique global tendu.

Le Poids des Coûts Opérationnels et du Dialogue Social

Le modèle belge, caractérisé par des coûts salariaux élevés (indexation automatique des salaires) et une forte tradition de dialogue social, limite considérablement la marge de manœuvre des entreprises pour des restructurations rapides et indolores. Les tentatives passées de Carrefour de rationaliser ses opérations ont souvent rencontré une forte résistance syndicale, générant des conflits sociaux coûteux en termes d'image et de finances. En 2025, cette réalité structurelle reste un frein majeur à une adaptation agile et pèse lourdement sur la compétitivité des magasins.

Le Virage Numérique et Omnicanal

L'investissement dans l'e-commerce, les services de livraison à domicile et le click & collect est devenu indispensable. Carrefour Belgique a investi dans ces domaines, mais la rentabilité de ces canaux reste un défi de taille. Les concurrents locaux ont également fortement développé leurs offres numériques, imposant une course à l'innovation et à l'efficacité logistique qui exige des capitaux et des expertises considérables.

La Stratégie Globale du Groupe Carrefour

La direction du groupe Carrefour, menée par son PDG, a clairement affiché sa volonté de se concentrer sur les marchés clés et de maximiser la création de valeur pour ses actionnaires. L'examen des actifs en cours, qui touche toutes les entités du groupe, est un exercice financier standard. Il vise à identifier les activités qui ne répondent pas aux critères de rentabilité ou de potentiel de croissance fixés par le groupe. La Belgique, malgré sa proximité géographique et culturelle avec la France, pourrait être perçue comme un marché non stratégique ou un 'poids mort' potentiel si ses performances ne sont pas à la hauteur des ambitions mondiales du groupe.

Quels Scénarios pour Carrefour Belgique ?

L'incertitude actuelle ouvre la voie à plusieurs hypothèses, chacune avec des implications majeures :

• Le Désengagement Complet (Vente ou Cession) : Ce serait le scénario le plus radical. Carrefour pourrait chercher à vendre l'intégralité de sa filiale belge. Les potentiels acquéreurs pourraient être d'autres groupes de distribution internationaux (avec de fortes contraintes réglementaires liées à la concurrence) ou des fonds d'investissement spécialisés dans la reprise d'actifs commerciaux. Une telle opération serait complexe, notamment en raison du modèle franchisé actuel.
• Une Restructuration Massive : Le groupe pourrait décider de rester, mais en réduisant drastiquement la voilure. Cela impliquerait des fermetures de magasins (ceux encore en propre), une réduction des effectifs, et une focalisation sur des formats spécifiques (comme les magasins de proximité Carrefour Express) ou des régions jugées plus rentables. Un nouveau plan social serait alors inévitable.
• Le Maintien avec des Ajustements Stratégiques Ciblés : Moins probable dans le contexte actuel de 'revue d'actifs', ce scénario verrait Carrefour investir de manière ciblée pour améliorer sa compétitivité. Cela pourrait passer par un renforcement des marques propres, une optimisation poussée de la chaîne d'approvisionnement, ou une nouvelle stratégie de différenciation pour se distinguer de la concurrence.

Les Enjeux Humains et Économiques d'une Décision Cruciale

Les conséquences d'une décision majeure de Carrefour s'étendraient bien au-delà des bilans comptables :

• Pour les Salariés : L'incertitude génère une profonde anxiété. Un départ ou une restructuration impliquerait des suppressions d'emplois, des plans sociaux et des reconversions nécessaires pour des milliers de familles.
• Pour les Franchisés : Leur modèle économique repose sur le soutien de la centrale Carrefour (approvisionnement, marketing, notoriété de la marque). Un désengagement pourrait les contraindre à trouver un nouveau partenaire ou à changer d'enseigne, avec des risques financiers importants.
• Pour les Consommateurs : Une réduction de l'offre Carrefour pourrait entraîner une diminution de la concurrence, affectant potentiellement les prix et la diversité des produits disponibles.
• Pour l'Économie Belge : L'impact se ferait sentir sur l'emploi, les fournisseurs locaux qui dépendent de Carrefour, et plus largement sur le dynamisme du secteur de la grande distribution.

Conclusion : Un Avenir en Pointillés

En ce mois de décembre 2025, l'avenir de Carrefour en Belgique demeure dans une zone grise, marqué par l'attente fébrile d'une annonce officielle. Les pressions sont multiples et bien réelles : une concurrence implacable, des coûts opérationnels élevés, et une exigence de rentabilité renforcée de la part du groupe. Carrefour doit arbitrer entre la logique financière globale et les réalités complexes d'un marché belge où l'implantation historique ne suffit plus à garantir la pérennité.

Les prochains mois seront déterminants. La décision finale de Carrefour aura des répercussions profondes sur l'emploi, le commerce de détail et l'économie belge dans son ensemble. EuroMK News continuera de suivre cette situation de près, à l'affût de toute nouvelle évolution concernant ce dossier stratégique.