Budget wallon 2026 : La Cour des comptes alerte sur une trajectoire budgétaire "trompeuse" face aux emprunts pour déficits
Bruxelles, le 9 décembre 2025 – Les couloirs du Parlement wallon résonnent cette semaine d'une effervescence particulière. À l'approche de la date fatidique du 18 décembre, où le budget 2026 de la Wallonie doit impérativement être voté, les parlementaires sont plongés au cœur d'intenses débats. Mais au-delà des joutes politiques habituelles, une voix autorisée vient semer le doute et exiger plus de transparence : celle de la Cour des comptes. Dans une analyse sans concession, l'institution dénonce une trajectoire budgétaire qui "n’intègre pas les emprunts pour couvrir les déficits", soulevant de sérieuses questions sur la viabilité et la sincérité des prévisions financières régionales.
Une mise en garde claire de la Cour des comptes
L'avertissement de la Cour des comptes, révélé initialement par Le Soir et dont EuroMK News a pris connaissance, est d'une gravité notable. Il ne s'agit pas d'une simple observation technique, mais d'une critique fondamentale de la méthode de présentation du budget. En substance, la Cour reproche à l'exécutif wallon de présenter une trajectoire budgétaire à moyen et long terme qui ne reflète pas la réalité de son financement. Concrètement, lorsque la Région Wallonne enregistre un déficit, elle le couvre par l'emprunt. Or, l'impact de ces emprunts – notamment le service de la dette (intérêts et remboursements de capital) – ne serait pas pleinement intégré et quantifié dans les projections budgétaires futures. Cette omission crée une illusion d'optique : la santé financière future de la Wallonie pourrait apparaître plus robuste sur le papier qu'elle ne l'est en réalité.
"L'absence de cette intégration biaise la perception de la dette régionale et de sa soutenabilité," explique un analyste financier familier des rouages budgétaires belges. "Cela revient à construire une route en ignorant le coût du béton qui a été acheté à crédit pour la réaliser. Le problème n'est pas seulement le déficit actuel, mais la manière dont on planifie sa résorption sans en afficher les véritables conséquences futures sur les charges de la Région."
Le Budget 2026 sous la loupe : entre ambitions et réalités
Présenté fin octobre 2025, le budget wallon pour l'exercice 2026 est censé dessiner les grandes lignes de l'action gouvernementale pour l'année à venir. Il prévoit généralement des investissements dans des domaines clés comme la transition énergétique, la mobilité, la relance économique post-crise, et le soutien aux services publics. Cependant, les constats de la Cour des comptes viennent obscurcir ces perspectives. Si les déficits passés et actuels sont financés par de nouveaux emprunts, et que le coût de ces emprunts n'est pas pleinement intégré dans la planification à long terme, la marge de manœuvre budgétaire future de la Wallonie pourrait être considérablement plus contrainte que ne le laissent entendre les chiffres officiels. Cela pourrait potentiellement impacter la capacité de la Région à honorer ses engagements, à investir ou même à maintenir la qualité de ses services sans recourir à des mesures d'ajustement douloureuses.
Transparence et crédibilité : des enjeux majeurs
Le rôle de la Cour des comptes est de garantir la transparence et la bonne gestion des deniers publics. Ses avis sont d'autant plus importants qu'ils émanent d'une institution indépendante des pouvoirs politiques. En pointant du doigt cette lacune, la Cour met en lumière un enjeu fondamental de crédibilité. Pour les citoyens, les entreprises et les investisseurs, avoir une vision claire et honnête des finances régionales est essentiel. Une présentation incomplète ou optimiste des chiffres peut éroder la confiance et, à terme, rendre plus difficile l'accès aux marchés financiers pour la Région, potentiellement à des taux d'intérêt plus élevés. Dans un contexte de taux d'intérêt fluctuants et de pressions inflationnistes persistantes observées tout au long de 2025, chaque point de pourcentage compte.
Cette situation n'est pas sans rappeler des préoccupations similaires exprimées par le passé concernant les budgets fédéraux ou d'autres entités régionales. La gestion de la dette et la présentation des comptes publics sont des défis constants pour l'ensemble des pouvoirs en Belgique.
Les débats parlementaires : un test pour la majorité
Les prochains jours au Parlement wallon seront donc décisifs. Les partis de l'opposition, armés du rapport de la Cour des comptes, ne manqueront pas de presser la majorité (actuellement composée du PS et d'Ecolo) de s'expliquer et d'apporter des correctifs. On peut s'attendre à des interventions virulentes de la part de formations comme le MR ou Les Engagés, qui dénonceront un manque de rigueur budgétaire et une gestion potentiellement irresponsable. Le Parti du Travail de Belgique (PTB) pourrait également saisir cette opportunité pour critiquer la politique économique globale du gouvernement.
La majorité, quant à elle, devra défendre son budget et ses choix. Elle pourrait arguer que la méthodologie utilisée est conforme aux pratiques en vigueur, que des mesures sont prévues pour contenir la dette à long terme, ou que les projections de la Cour des comptes sont trop pessimistes. Néanmoins, l'avis d'une institution comme la Cour des comptes est difficile à balayer d'un revers de main, et la pression sera forte pour apporter des clarifications substantielles, voire des amendements de dernière minute, afin d'intégrer davantage de réalisme et de transparence.
Un défi structurel pour l'avenir de la Wallonie
Au-delà de l'enjeu immédiat de l'approbation du budget 2026, cette controverse met en lumière un défi structurel pour la Wallonie. La région fait face à des besoins importants en matière de reconversion économique, de lutte contre la pauvreté, de transition écologique et de maintien de la qualité de ses infrastructures et services publics. Tous ces défis nécessitent des investissements massifs et une gestion financière irréprochable. Si la réalité de l'endettement n'est pas pleinement prise en compte dans la planification, la capacité de la Wallonie à financer son avenir et à assurer la prospérité de ses citoyens pourrait être compromise à moyen et long terme.
La question des emprunts pour couvrir les déficits n'est pas nouvelle en Wallonie. Au cours des dernières années, la Région a dû faire face à des situations économiques complexes, aggravées par des crises successives. La Cour des comptes a régulièrement émis des avis sur la nécessité d'une plus grande prudence budgétaire et d'une meilleure maîtrise de la dette. L'alerte de cette semaine doit donc être perçue comme un rappel pressant et non comme un événement isolé.
Vers une adoption sous haute surveillance
Le 18 décembre marquera l'épilogue de cette intense période budgétaire. L'adoption du budget 2026 est cruciale pour le bon fonctionnement de la Région dès le 1er janvier 2026. Cependant, l'ombre de l'avertissement de la Cour des comptes planera sur ce vote. Il est probable que le gouvernement wallon doive s'engager sur des pistes de réformes ou de transparence accrue pour apaiser les craintes et rassurer les marchés. L'enjeu n'est pas seulement de voter un budget, mais de poser les bases d'une gestion financière durable et crédible pour la Wallonie. EuroMK News continuera de suivre de près l'évolution de ces débats et leurs conséquences pour les citoyens wallons.
