TEL-AVIV, Israël – 5 décembre 2025 – Une décision du Premier ministre Benjamin Netanyahou, annoncée ce mois-ci, a fait l'effet d'une onde de choc dans les cercles du renseignement israélien et au-delà. Le général de division Roman Gofman, un officier militaire de carrière sans expérience connue au sein des services de renseignement, a été désigné pour prendre les rênes du Mossad, le prestigieux service extérieur de renseignement d'Israël, en juin 2026. Cette nomination, qui le verra succéder à l'actuel chef David Barnea, dont le mandat de cinq ans arrivera à terme, rompt avec une tradition de longue date et soulève d'intenses débats sur l'avenir de l'une des agences d'espionnage les plus redoutables du monde.
Une Rupture avec la Tradition : Le Choix de Roman Gofman
L'annonce a été faite par le bureau du Premier ministre Netanyahou dans un communiqué laconique, confirmant le choix du général de division Roman Gofman. Né en Biélorussie, Gofman est un officier respecté au sein des Forces de Défense d'Israël (Tsahal), ayant gravi les échelons et occupé des postes de commandement clés au cours de sa carrière militaire. Cependant, et c'est là que réside la controverse, son parcours est exclusivement militaire, sans la moindre immersion préalable dans le monde complexe et souvent obscur du renseignement, que ce soit au sein du Mossad lui-même, du Shin Bet (sécurité intérieure) ou de la Direction du renseignement militaire (AMAN).
Traditionnellement, les chefs du Mossad sont des vétérans ayant passé des décennies au sein de l'agence, ayant gravi chaque échelon de l'organisation et maîtrisé les arcanes de l'espionnage, de la collecte d'informations secrètes, des opérations clandestines et de la diplomatie secrète. Des figures comme David Barnea, Yossi Cohen, Tamir Pardo ou Meir Dagan sont toutes issues de ce moule, ayant une connaissance intime des réseaux, des méthodes et de la culture unique de l'agence.
Le Parcours d'un Militaire Aguerri, mais sans les « galons » de l'ombre
Le parcours du général Gofman est indéniablement impressionnant d'un point de vue militaire. Son service au sein de Tsahal est jalonné de succès, de positions de leadership et d'une réputation de stratège rigoureux et de commandant pragmatique. Il a été impliqué dans des opérations sur le terrain et a dirigé des unités importantes, notamment au sein de l'infanterie ou des forces spéciales. Sa nomination est perçue par certains comme un signe de la confiance de Netanyahou en ses capacités de leadership et sa loyauté.
Cependant, le Mossad n'est pas une armée. Ses missions requièrent des compétences très spécifiques : une compréhension des dynamiques géopolitiques complexes, une capacité à gérer des agents infiltrés dans des environnements hostiles, à déjouer les services étrangers, à mener des opérations secrètes avec une discrétion absolue, et à traiter des informations ultrasensibles. Ces compétences sont forgées par des années d'expérience directe dans les opérations clandestines et l'analyse du renseignement, domaines où Gofman n'a, selon les informations disponibles, aucune expérience.
Inquiétudes et Speculations : Que Signifie ce Choix pour le Mossad ?
Cette décision a immédiatement déclenché une vague d'inquiétude et de spéculation parmi les anciens combattants du renseignement, les analystes et même au sein de l'establishment sécuritaire israélien. Des sources proches des milieux du renseignement, s'exprimant sous couvert d'anonymat, craignent que ce choix n'affaiblisse le Mossad en plaçant à sa tête une personne qui devra apprendre les ficelles du métier à la tête de l'organisation. « Le Mossad n'est pas une école de formation pour les commandants militaires », a confié un ancien cadre de l'agence à EuroMK News, « c'est une institution qui opère à un niveau de complexité et de risque extrême, où chaque décision peut avoir des répercussions mondiales. »
Les interrogations portent également sur la capacité de Gofman à s'intégrer dans la culture très particulière du Mossad, une culture d'élite, de secret et de loyauté interne. La nécessité de gagner la confiance des agents et des officiers supérieurs, souvent sceptiques face aux nominations extérieures, sera un défi majeur. Certains observateurs politiques suggèrent que cette nomination pourrait être une tentative de Netanyahou de nommer des figures moins ancrées dans l'establishment du renseignement, potentiellement perçu comme trop indépendant ou en désaccord avec certaines de ses politiques.
Le Contexte Géopolitique Post-7 Octobre 2023
La décision intervient dans un contexte géopolitique particulièrement tendu pour Israël. Après les événements tragiques du 7 octobre 2023, la pression sur les services de renseignement israéliens est immense. La nécessité de prévenir de futures menaces, de contrer les activités iraniennes dans la région, de gérer les fronts complexes de Gaza et de la Cisjordanie, et de maintenir une supériorité stratégique exige un Mossad au sommet de ses capacités. Dans ce climat, la nomination d'un dirigeant sans expérience du renseignement est perçue par beaucoup comme un pari risqué.
Le Premier ministre Netanyahou, de son côté, pourrait chercher à insuffler une nouvelle dynamique, potentiellement plus agressive ou plus directement alignée sur ses propres visions stratégiques, en nommant un homme de confiance issu de l'armée. Il est possible qu'il valorise les qualités de leadership direct et la capacité d'exécution rapide de Gofman, jugeant ces attributs plus pertinents face aux défis actuels. Cependant, cette approche pourrait également aliéner des éléments clés au sein de l'agence.
Les Défis à Venir pour Roman Gofman et le Mossad
Lorsque Roman Gofman prendra officiellement ses fonctions en juin 2026, il sera confronté à une tâche colossale. Ses défis incluront :
- L'apprentissage accéléré : Assimiler des années de savoir-faire en matière de renseignement, de méthodologies d'opération et de réseaux mondiaux en un temps record.
- La confiance interne : Gagner le respect et la loyauté d'une organisation d'élite qui opère dans l'ombre et qui a des attentes très spécifiques envers son leader.
- La complexité régionale : Naviguer dans les eaux troubles du Moyen-Orient, avec la menace nucléaire iranienne, les activités du Hezbollah et du Hamas, et les efforts de normalisation avec les États arabes.
- Les relations internationales : Maintenir et renforcer les liens cruciaux avec les agences de renseignement alliées, notamment américaines et européennes, qui reposent sur une compréhension mutuelle des opérations secrètes.
La succession de David Barnea, dont le mandat fut marqué par une intensification des opérations contre l'Iran et une collaboration discrète mais efficace avec plusieurs pays arabes, laissera des traces. Barnea incarne l'archétype du chef du Mossad, ayant passé une grande partie de sa vie au service de l'agence. Le contraste avec son successeur ne pourrait être plus frappant.
Une Observance Attentive de la Scène Internationale
La désignation de Roman Gofman à la tête du Mossad sera sans aucun doute suivie avec une attention particulière par les capitales du monde entier. La capacité du général à s'adapter à ce rôle inédit et à maintenir l'efficacité légendaire du Mossad sera un test majeur pour Israël et pour la crédibilité de ses services de renseignement. L'impact de cette décision audacieuse du Premier ministre Netanyahou ne se fera sentir que dans les années à venir, mais le débat qu'elle a lancé est d'ores et déjà d'une importance capitale pour la sécurité d'Israël.
Selon des informations relayées par plusieurs médias européens, dont la RTBF, l'annonce a suscité des réactions mitigées, allant du soutien discret de certains au sein du Likoud à la franche opposition des partis d'opposition et des figures sécuritaires indépendantes. Alors que le monde s'apprête à tourner la page de 2025, la désignation de Gofman marque déjà un chapitre potentiellement historique pour le Mossad.